Technologies (et usages) de l?anonymat à l?heure de l?Internet
Appel à articles pour un dossier thématique de la revue Terminal
(http://www.terminal.sgdg.org/nouveau/spip.php?article38)
Préambule
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Vivre en société débute par recevoir d?elle un nom, son nom, et de par cet
acte fondateur, devenir une personne à part entière, circuler parmi les
autres, échanger? La société est en cela le lieu du nom, de la nomination, et
le pacte citoyen qui en découle ne saurait durablement se satisfaire de liens
anonymes. L?anonymat a contrario est la qualité de ce qui est sans nom ou sans
renommée, d?une action non signée, d?un acte sans auteur. Sans auteur
repérable, identifiable. C?est-à-dire hors d?atteinte, sans adresse.
Irresponsable ? D?aucuns s?accorderont pourtant à voir dans l?anonymat
l?expression de la démocratie ; l?urne transparente, aujourd?hui menacée par
le vote électronique, en est certainement le meilleur symbole. Jusqu?où
l?anonymat est-il légitime ? Qui doit en juger ? Quel équilibre entre le fait
que l?anonymat soit, puisse être, légitime individuellement, et nocif
socialement ?
Le succès d?Internet et de la société mondiale qu?il sous-tend, société sans
frontières qui n?a probablement pas les mêmes fondements a relancé la
question de l?anonymat et de sa fonction sociale : y domine l?idée d?une
protection de l?individu vis-à-vis de l?opacité des pouvoirs de toutes natures
qui, à l?encontre de la liberté promise (de s?associer, d?exprimer ses
opinions?), pourraient l?assujettir? Derrière les stratégies de présentation
de soi qui se développent sur le Net, se dessinent alors, et comme une parade,
les contours parfois tentaculaires d?une identité numérique produite par
l?individu lui-même et qui, doté des outils ad hoc, tels l?anonymisation,
l?usurpation (frauduleuse ?), ou encore le masquage de l?identité, entend
mener des actions de son point de vue performantes et rentables au vu du
risque qu?elle font encourir (exemple classique de ce type d?actions : le
téléchargement illicite, quoique jugé légitime pour beaucoup, de fichiers
mp3?)
On assiste alors à deux types d?appréciation d?un phénomène qui opère sur le
triple front du technique, du juridique et du social : d?un côté, l?anonymat
est, davantage qu?une promesse, une assurance de liberté d?action sur le
réseau face aux lois sécuritaires de plus en plus intrusives et répressives
(rétention des données de connexion?), aux assauts répétés des publicitaires
et de ceux qui n?hésitent pas à exploiter les données commerciales en leur
possession (affaire FaceBook?), actions menées à l?encontre de l?individu peu
ou prou averti et qui toutes menacent ses libertés privées, de l?autre, il est
le signe à terme d?un délitement ou, pour le moins, d?une recomposition du
social quand sur le Net toujours, toutes les règles de sociabilité se peuvent
subvertir (xénophobie, pédophilie, escroqueries de toutes sortes?), quand les
traces laissées par des internautes peu vertueux ne mènent que vers des
avatars de leur personne? Se pose à l?inverse, pour les victimes de ces
nouveaux préjudices, la question d?une pénalisation de l?usurpation de
l?identité numérique, c?est-à-dire la possibilité de reconnaître qu?une
personne dont on a utilisé à son insu l?avatar ou le pseudo ait subi un
préjudice moral, reconnu par la loi et passible d?une peine.
En d?autres termes, se confrontent la perspective juridique, qui agi a
posteriori et n?attente pas fondamentalement aux libertés privées, et la
perspective policière, toute armée de ses dispositifs de contrôle aujourd?hui
biométriques et foncièrement liberticides en cela qu?ils identifient à l?insu
de la personne identifiée, se passant ainsi de ce qui en faisait une entité
politique, à savoir sa déclaration d?identité : je déclare être celui que je
suis?
Au-delà d?Internet, l?anonymat en tant qu?il participe à préserver au
citoyen le respect de ses droits est une des questions récurrente de ce que
l?on a coutume d?appeler l?informatisation de la société, problématique bien
connue depuis au moins la loi de 78, la création de la Cnil et puis dans son
sillage celle du Creis. S?y déploie une réflexion sur l?encadrement législatif
du fichage, c?est-à-dire de l?acquisition de données nominatives, de la
conservation de ces données, des traitements effectués sur elles, et de leur
anonymisation. Cette problématique s?actualise toutefois à l?heure où les
données publiques concernant les individus sont si nombreuses sur Internet
qu?il est techniquement possible dans bon nombre de cas de constituer
furtivement des fiches nominatives comportant des données personnelles, voire
des données sensibles.
En marge, toujours, d?Internet, se pose la question des procédures qui
nécessitent l?identification et qui promettent, dans une perspective de
proportionnalité, l?anonymat : Pass Navigo, mais aussi émargement lors du
vote, consultation des membres du personnel par une administration, une
entreprise, etc. Quelles garanties (entre autres juridiques) quant au respect
du principe d?anonymat, quelles possibilités de constat et de contentieux
quand ce principe est bafoué ?
Orientations
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Dans cette nouvelle livraison de Terminal, nous entendons faire de l?anonymat
un concept clé, explicatif des tendances du (lien ou pacte) social à l?heure
de l?Internet et de la communication généralisée ; nous entendons mettre en
évidence à côté des dispositifs technologiques de surveillance et de
contrôle sur lesquels il prend appui , la place qu?il occupe dans la
constitution de l?identité du sujet, et notamment chez les plus jeunes, dans
l?évolution de la notion même d?identité, et envisager les impacts sociaux,
cognitifs, culturels et politiques liés à cette évolution.
Pour cela, nous privilégions deux approches :
- approches historiques, politiques, juridiques, psychologiques? de la notion
d?anonymat, et de la façon dont l?anonymat se conjugue aux technologies.
- approches de type monographiques quant aux usages, enjeux et réalités de
l?anonymat dans des dispositifs juridiques et techniques tels que le vote
électronique, le recueil d?avis, la constitution de fichiers de personnes et
le procès d?anonymisation, ou encore le fonctionnement de lieux d?échanges, de
rencontre
Calendrier
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- dépôt des propositions des articles (résumé d?une à deux pages) avant le 1er
novembre 2009 à (Chantal.Enguehard /at/ univ-nantes.fr) et (rpanico /at/ wanadoo.fr) ;
- décision d?acceptation communiquée aux auteurs avant le 15 décembre 2009 ;
- soumission des articles avant le 15 février 2010,
- envoi des rapports des relecteurs pour le 15 avril 2010 ;
- version révisée des articles attendue au 15 juin 2010.
Chantal Enguehard
LINA - UMR CNRS 6241
2, rue de la Houssinière
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http://www.sciences.univ-nantes.fr/info/perso/permanents/enguehard/